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Nippons et chaussées
14 août 2006

Fuji, partie 2

;Salut à tous!

Alors, on en était resté au vieux train bringuebalant entre les rizières. Qu'en est-il finalement?

Eh bien, tout d'abord, j'eus la surprise de constater qu'ici, la personne qui contrôle vos billets pousse en même temps un petit chariot de friandises pour apaiser l'estomac des voyageurs. J'espère que le cumul des fonctions ne va pas jusqu'à faire qu'elle est aussi censée conduire le train pendant ce temps.
N'empêche, ça doit donner lieu à des situations assez poilantes, du genre : "Ah nan, désolé, votre billet n'est pas valable, ça vous fait 50.000 Yens d'amende. Un coca pour vous remonter le moral?"
Je me fais moi-même refouler à l'arrière du train pour avoir eu l'outrecuidance de prendre un siège "Reserved". Pas cool.

Dehors, c'est le pays des brumes. Je me sens bien dans ma peau, comme si la nature constituait finalement un terrain connu après tant de changements. Les lignes électriques géantes qui courent dans la forêt me font penser ces buissons entièrement recouverts de toiles d'araignées au Palais Impérial.

Nous passons une dernière station au nom hallucinant, puis le train repart en arrière (!!!!) dans une autre direction. Nous sommes à 849m. Croisons un parc d'attraction, montagnes russes dans les montagnes japonaises.
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Le doute n'est plus permis à présent : j'ai le mal de mer. Ca ne m'est jamais arrivé, a fortiori en train, et c'est ce que je me répète pour faire passer le malaise. Au bout d'un certain temps, il finit par comprendre qui est le maître de l'oreille interne ici.
Beaucoup de touristes. Tous voyagent en groupe, certains s'étonnent : "You're alone?!".
Un gentil soleil éclaire Kawaguchiko, dernier bastion de civilisation avant le reste (qui fait un peu touriste d'ailleurs, on se croirait à Disneyland avec ces bâtiments simili-alpins). C'est kitsch et high-tech à la fois, comme beaucoup de trucs ici finalement. J'ai vérifié la météo hier, normalement le beau temps devrait perdurer.

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Boutique. Quelques lycéennes déambulent parmi les rayonnages de petits gâteaux. Le magasin vend du matériel de camping et de survie (oxygène, couvertures), ça fiche un peu les jetons. Bah, au pire, ça me fera des trucs à raconter si je me fais rapatrier en hélico.
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Le tout est finalement un peu glauque et cher. J'écourte mon séjour dans les lieux.
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Je décolle. Le bus est ancien, avec un parquet en vrai bois et des sièges en vrai tissu écossais moche. Une véritable carte postale ambulante. Votre serviteur est le seul gaijin du lot.
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Trajet tranquille. La route se faufile, taillée à même la forêt. Troncs marron clair, feuillage nuancé. Arbres dévastés par un typhon (ou un brontosaure en vadrouille).
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Ca grimpe, rien d'autre. Petites frayeurs quand d'autres bus nous frôlent dans des virages serrés.
A droite, quelques arbres, puis rien d'autre que le ciel blanc et brillant comme si nous étions la dernière route avant la fin du monde.
Au moment de passer la 4e étape, je suis nerveux comme un amoureux à son premier rendez-vous (du moins, c'est la comparaison un peu bateau qui me vient à l'esprit sur le moment. En tout cas, j'avais l'estomac qui ne tenait pas en place).
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Soudain...

"Mite! Mite!"

Bang, le Mont Fuji, l'espace de quelques secondes, est apparu derrière les arbres. Chacun se penche à la fenêtre pour tenter d'observer sa masse imposante. D'après la carte, nous monterons par le versant Nord.
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15h, et le Fuji est la dernière chose sur Terre. Au delà, le Néant, maëlstorm de nuages, a grignoté le reste du monde et règne en maître sur les derniers arpents comme sur les vieilles estampes nuageuses.

La cinquième station depuis Kawaguchiko ressemble à un petit village de montagne conçu par un type qui n'aurait jamais vu la montagne de sa vie. Pseudo-chalets, sol de pierre un peu crade, le tout laisse l'impression fugace qu'on a essayé de construire le maximum de boutiques de souvenirs dans le minimum d'espace. On peut monter à dos de cheval, lesdites bestioles paissent tranquillement dans un coin.

Entre deux magasin, un torii rouge ouvre le chemin d'un petit sanctuaire où on peut, outre prier, accéder à une plateforme d'observation ou acheter des boissons fraîches et autres petits présages. Imaginez un distributeur Selecta au fond d'une chapelle et vous aurez un petit aperçu de mon étonnement sur le coup. Finalement, les bidules mercantiles s'intègrent assez bien à l'ensemble, surtout que j'avais soif.

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Partout, des panneaux "Gardez le Mont Fuji propre!" mais pas une poubelle à l'horizon.
Pas d'eau non plus. Les robinets sont approvisionnés par des citernes qu'on importe du lac voisin. Une pancarte nous indique que ça coûte cher, merci de les utiliser avec parcimonie.
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Je me balade un peu pour goûter à l'atmosphère de cette altitude où les grimpeurs qui débarquent croisent ceux qui reviennent de la montagne. Tout le monde a son sac, quelques stands extérieurs font du feu, les cheveux se promènent, on se croirait dans un campement de nomades. J'hésite à partir tout de suite. Il n'est que 16h. Dans ma volonté de ne pas arriver en retard, je me retrouve avec beaucoup trop de temps libre.
Du coup, je monte dans un restaurant désert, commande le plat le moins cher de la carte (un bol de riz, 300Y) et m'attable. Je lie connaissance avec les seuls autres occupants du coin, un couple de Japonais qui déguste une soupe. Le mari me confie qu'il a grimpé le Fuji quand il avait 17 ans, mais qu'il trouve la montagne plus belle à regarder de loin. Il y a en effet cinq lacs autour, tous rivalisant au niveau de la vue qu'ils offrent.
Le repas et ce contact m'ayant redonné courage, je décide de partir immédiatement. La route est large, fréquentée. Je me mets en marche.

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Le début de la randonnée est assez enchanteur : de la nature, des arbres qui semblent mêler le bouleau et le cyprès (et pourtant si loin), une terre noire et volcanique.
La suite du chemin a été aménagée pour la grimpe, c'est à dire qu'on y a ajouté des tunnels, des chemins artificiels avec des buttes de fer et de béton, bref des machins sensés rendre l'ascencion pratique mais finalement carrément moches. De temps en temps, on trouve des groupes de bâtiments imbriqués les uns dans les autres : maisons, refuges, toilettes payantes. On salue les gens qui s'y reposent, les employés vous supplient de payer un prix monstre pour squatter la nuit.
Puis le chemin continue et c'est le retour à la rocaille.

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11 août, 18h10 - Arrivé à un refuge qui vend de la nourriture, j'ai découvert la banane la plus haute du monde. C'est aussi la plus chère.
Autour de moi, un nouveau paysage. Contrairement aux cartes postales sur lesquelles il apparaît, le Mont Fuji n'est pas bleu, ni vert. Il est rouge.  A 3.000m, la roche vierge de béton s'expose, sulfureuse et grêlée comme un paysage lunaire. Contrastant avec cet aspect de mort, des plantes grasses d'un vert éclatant poussent régulièrement sur le côté du chemin. C'est assez surréaliste.

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18.30 Je suis arrivé à la 8e station, et le Mont Fuji s'écroule dans les nuages. Derrière sa courbe, le soleil se couche. J'aperçois des lambeaux rouges dans le ciel. On s'assied un instant avec d'autres et on crie des trucs au vide.

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Caillasse rouge, chemin plus escarpé. Parfois, la rando se transforme en escalade, car il faut s'aider des mains pour progresser. Les pieds s'enfoncent dans le gravier, deux pas en avant, un demi en arrière.
La nuit tombée, un orage éclate au loin. Les éclairs illuminent la masse nuageuse, auxquels répondent les flashs des pèlerins.
Froid malgré la triple couche de vêtements.

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Je décide de dîner. A cette altitude, le curry rice est à 1.500Y. A peine plus cher qu'à Paris, mais pour du riz et un peu de sauce, je préfère un râmen cup (600Y) que je déguste à l'extérieur. J'ai l'air follement sexy avec tout mon attirail : casquette, lampe frontale, K-way.
Là-bas, les éléments se déchaînent. Certains restent dormir afin d'être en forme pour attaquer la suite. Pour ma part, je vais continuer encore un peu.

A suivre...

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Commentaires
H
Tu fais ce que tu veux avec les tiennes hein :D
B
matos de survie, oxygène XD <br /> <br /> enfin ça doit etre magnifique la haut ^^<br /> <br /> ps: mais quelle idée de manger des bananes aussi :p
Nippons et chaussées
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