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Nippons et chaussées
13 août 2006

Fuji, partie 1

J'aimerais dédier ce post au charmant touriste qui, non content de fumer dans le lobby, se permet aussi de se servir du clavier comme d'un cendrier géant! @.@
Je n'ai pas découvert sa chambre, sans quoi je pense que j'aurais mis le tout devant, soigneusement empilé dans une soucoupe pour qu'il y marche joyeusement ce matin. La vie est parfois cruelle.


Alors, Fuji, Fuji, qui es-tu?

Fujisan (
富士山) est situé entre les préfectures de Shizuoka et de Yamanashi, d'où les habitants peuvent jouir de sa vue lorsque le temps le permet (ce qui doit arriver au moins une ou deux fois par an, au beau milieu d'une nuit sans lune par exemple).

Voisin des côtes océanes, il s'agit aussi d'un volcan toujours en activité (la dernière éruption date de 1707) dont la silhouette est très présente dans l'art local (on notera à ce sujet les superbes Vues du Mont Fuji, par Hokusai)

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A noter que, contrairement à une idée reçue, le nom du volcan ne se prononce pas "Fujiyama", terme qu'on ne retrouve que dans certaines productions touristiques (pour ne pas déstabiliser le pauvre gaijin). Fuji-no-yama est correct, mais obsolète.

Sa première ascencion fut réalisée par un moine en 663. Jusqu'à l'air Meiji (à partir de 1867), le sommet était interdit aux femmes. Cette directive fut pour la première fois bravée avec succès par une étrangère dont j'ai la flemme d'aller chercher le nom ^.^

A sa base s'étend une immense forêt emprunte de légendes, telle la présence de monstres divers habitant ses grottes. C'est aussi un endroit très apprécié de ceux qui en ont marre de la vie, puisqu'on y a retrouvé quelques 78 corps. Vous pourrez voir à Aokigahara (c'est son nom) des panneaux indiquant qu'il est interdit de mettre fin à ses jours dans la forêt (et aussi ramasser ses déchets et prière d'éviter les feux de camp).

Enfin, nos amis geeks seront heureux de savoir que le logo d'Atari n'est autre que le Mont Fuji stylisé.
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11/08/06
6.30 AM

Levé aux aurores. Déjeuné de fruits et de nouilles instantanées. Direction Shinjuku, vers un bureau des bus KEIO que j'avais repéré la veille.
C'est à ce moment là que la gentille guichetière casse ma belle motivation d'un "Today is full!" sans réplique.

Du trajet A :

Shinjuku - Kawaguchiko 5th station (bus)

Nous passons donc au trajet B :

Shinjuku - Ginza - Minami Senju (train) - Nakaokachimachi (marche à pieds) - Okachimachi - re Shinjuku - Kanda - Takao - Ôtsuki - Kawaguchiko (train) - 5th station (bus)

Mais il en faut plus pour décourager un hérisson, d'autant plus qu'il y aura toujours un gentil Japonais pour m'indiquer mon chemin (mis à part le contrôleur de bus sur la fin, qui a failli m'envoyer 50 kilomètres à l'est avant que je lui montre mon billet pour confirmation xD)

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N'empêche, ça valait le coup. Au bout d'un moment, les immeubles de la anlieue Tôkyôite disparaissent pour laisser place à un Japon de carte postale. Dans la montagne, la nature reprend ses droits. Pas de pierre visible, comme si on avait transformé le minéral en végétal. Parfois, un flanc a été taillé pour donner naissance à des sculptures géantes et parfaitement intégrées à leur environnement (même si abattre des arbres et faire exploser de la rocaille n'est pas forcément le top en matière d'intégration).

Le train passe des tunnels et des ponts vertigineux, comme pour éviter de côtoyer la nature de trop près. Ici commence la route vers les hauteurs, derniers bastions de la tradition surnaturelle, où le vent n'est que le soupir des Kami affligés par l'arrogance des hommes.
Majestueuses, les montagnes disparaissent au loin dans un dégradé de bleu, comme si elles se mêlaient tout doucement au ciel et à la brume. La pierre vit et bouge comme la représentation d'un paravent ancien, lorsque l'oeil suit sa courbe et la voit bondir, plonger, menacer.

Autour de moi, le vert tendre des rizières coupées au caré côtoie le vert profond d'une forêt si mal taillée qu'on la croirait bouillonnante. Comme ils sont loin, les pâturages de nos pays, avec leurs forêts décharnées et l'herbe sous laquelle on aperçoit les éraflures de la terre et du roc!
Ici, tout est si mystérieux. La montagne se cache, nous ne sommes plus près d'elle que des puces errant dans la tignasse d'un hippie radioactif et dont le crâne couve un magma qui ne dort que d'un oeil.
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Il est 12.28, et j'aperçois le premier rayon de soleil depuis le début de la journée. Le bruit des insectes couvre celui du train.

Je suis bientôt arrivé à Ôtsuki, si du moins le type qui m'a indiqué le quai a vu juste. Maintenant que j'y pense, je ne suis pas tout à fait sûr de ne pas l'avoir vu changer de train au dernier moment.

J'essaye d'écrire sans quitter des yeux le paysage. Ca se traduit par des pattes de mouche pires que d'habitude. Mon Dieu, que c'est grand! C'est donc pour ça que les Japonais aiment tant les monstres et les robots démesurés? Coincé entre la montagne et l'océan, leur pays a de quoi inspirer des fureurs capables d'enjamber les siennes.
Ainsi, je ressens ce besoin de m'élever moi aussi pour, du bout des nuages, les embrasser et avoir, ne serait-ce qu'un instant, le centième du regard d'un géant.

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Paradoxalement, est-ce seulement au séjour des dieux de la montagne qu'on prend conscience de sa nature mortelle?
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Gare de Ôtsuki. Je me change vite fait. Il fait chaud, un peu. Beaucoup de monde.

Une vendeuse propose ses bentô avec le même ton que d'autres emploieraient pour demander un euro ou un ticket resto, Dieu vous l'rendra ma bonne dame.

Le train arrive, ses wagons peinturlurés de volcans anthropomorphes très kitsch. Les gens font la queue proprement pour entrer dans les wagons "non-reserved".

L'express est assez cher, mais grand et confortable (on dirait une phrase-type de mon bouquin de cours, tiens). Dans la voiture de tête, il y a même un petit salon pour observer le chemin qu'on parcourt. La place est optimisée de façon originale, ce qui donne une sensation de modernité mêlée à l'impression d'avoir pris place dans un de ces anciens trains à vapeur autour duquel se pressait un cortège de chapeaux gris, de malles et de kimono. Cela est peut-être dû aux grandes vitres qui laissent entrer la lumière à pleins flots, apportant dans son sillage des fragments du paysage exotique décrit plus haut.

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Le train démarre avec une petite musique de marchand de glace. Je dois arriver à Kawaguchiko, une des villes
qui ouvrent les pistes du Mont Fuji, et pendre le bus jusqu'à la 5e des stations qui le jalonnent.
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Le sol de la vallée est pavé de rizières caressées par le vent. On dirait que la vie s'infiltre partout, que chaque fissure, chaque tuyau cache une petite forêt.

Ici, le monde est fait de détours et de crevasses, si bien qu'il semble s'imbriquer dans lui-même comme un jeu de poupées russes.

Cà et là, des tentatives de dissuasion poir oiseaux : filets, câbles brillants. Je crois que je vais arrêter
d'écrire pour le moment. Comme disait l'autre, on gâte des sentiments si tendres à les raconter en détail.

A suivre

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Commentaires
H
Zaz - Disons qu'au bout d'un moment, tu deviens dépendant de ton carnet et tu le sors toutes les dix secondes pour marquer ce qui se passe xD<br /> <br /> Bunny - Euh ouais v.v<br /> <br /> Finou - Ici on a la saison des pluies, c'est marrant aussi ^.^;
F
Piouf... Ca fait vraiment rêver.<br /> <br /> Surtout quand tu explique le sentiment d'être tout petit face aux paysages... J'essayais de m'imaginer, y être aussi...<br /> <br /> Chez nous, il pleut trés beaucoup ^^" Il doit faire 15 degrés à tout casser depuis plusieurs jours... C'est l'été que dans le sud de la France. Tu ratte rien quoi :p<br /> <br /> Bisous!
B
quel veine poétique mon cher ^^ ça doit vouloir dire que les paysage doivent être vraiment grandiose (tu fais des photos hein ? *yeux suppliant* t'en fait ?)<br /> <br /> et heu, la foret, ya vraiment un panneau qui dit "ne vous suicidez pas merci" ?
Z
rah c'est désespérant, ça donne envie d'y aller ou d'acheter un carnet pour raconter ses voyages u___u<br /> En tout cas ça doit être bien pratique, ça évite de s'ennuyer ^^<br /> <br /> vivement la suite :)
Nippons et chaussées
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